Philosophie et narration : "Ne pas se raconter d'histoire"

Études littéraires, 42/2

ISBN : 2920949462
Collections : Études littéraires
Date de publication : 04/01/2020
Format : 175x235
Nombre de pages : 193
Informations : Publié en 2011
12,00 €

L’histoire est connue : tout commence quelque part en Grèce antique, alors que logos et muthos se confondaient en une seule voix dans la parole sacrée (hieros), jusqu’à ce qu’au siècle de Platon, une méfiance philosophique provoque la séparation entre les légendes fabuleuses et la recherche de la sagesse. La philosophie n’a peut-être d’autre origine que cette méfiance à l’égard du muthos, méfiance fascinée cependant, qui maintient à distance en même temps qu’elle semble répondre sans cesse au chant des sirènes narratives, attachée au mat de la raison.

Cependant, la narrativité, comme l’a montré Paul Ricoeur à maintes occasions, notamment à propos de l’histoire, cette autre discipline soupçonneuse, ne se limite pas au simple fait de raconter de la fiction. Il y a de la narrativité jusqu’à la limite de la pure syntaxe, pourrait-on dire. À partir du moment où les mots sont arrangés de façon à représenter un monde, parler de ce monde ne peut aller sans le présenter d’une certaine manière, sans lui donner une cohérence quelconque, c’est-à-dire en somme sans le raconter, ce dont ne se prive pas bien sûr la philosophie, ni l’histoire d’ailleurs, comme le soulignent heureusement depuis quelques décennies de nombreux historiens et non des moindres, que l’on pense à Michel de Certeau. La racine du fait narratif est ainsi enfouie beaucoup plus creux que ne le laissent croire les récits philosophiques d’affranchissement du narratif (dont il faudrait dresser un inventaire exhaustif, si la chose était possible). Mais affirmer cela, c’est du même coup prendre en compte l’inverse, à savoir que la racine philosophique est elle aussi très profondément enfoncée dans le terreau narratif et que le récit ne fait pas que raconter, il fait mieux : il pense en racontant. Ce dossier voudrait donc, à partir de quelques exemples, montrer ce double jeu de la pensée et du récit en examinant à l’oeuvre la pensée se racontant ou le récit pris en flagrant délit philosophique.

Présentation - Sarah Rocheville et Étienne Beaulieu

Études

Au commencement était le récit - Bruno Clément

Les à-côtés de la philosophie et le commérage transcendantal - Éric Méchoulan

L’instant cosmogonique et le récit philosophique - Rémy Gagnon

Paul Ricoeur : des poèmes aux récits et des récits aux poèmes - Nathalie Watteyne

Roland Barthes enquête : La chambre claire ou la mélancolie policière - Sophie Létourneau

La philosophie de Platon à l’épreuve de l’autobiographie - Benoît Castelnérac

Moby-Dick de Herman Melville : de l’allégorie de la caverne à l’allégorie de la baleine - André Duhamel

Joseph Joubert contre les romans - Étienne Beaulieu

Analyses

Images de la nature dans les romans de la Grande Guerre : esquisse d’une typologie - Pierre Schoentjes

Le rôle des déceptions dans À la recherche du temps perdu de Marcel Proust. Autofiction, crise du sujet et montage identitaire - Thomas Carrier-Lafleur

Julio Cortázar : fantastique et mysticisme oriental - Fanfan Chen

L’effet-Bartleby : répétitions et nouveautés dans Un homme qui dort de Georges Perec - Patrick Fortin-Tillard

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